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Face à la crise politique, les Haïtiens sont de plus en plus nombreux à fuir en Guadeloupe

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Face à la crise politique, les Haïtiens sont de plus en plus nombreux à fuir en Guadeloupe

Face à la crise politique, les Haïtiens sont de plus en plus nombreux à fuir en Guadeloupe

26 personnes ont été renvoyées vers Haïti, après s'être échouées dans les Antilles françaises.

“Depuis le début de la crise politique en Haïti, nous assistons à une recrudescence d’arrivées de ressortissants de ce pays”, raconte un membre de de la Cimade Guadeloupe, une association d’aide aux étrangers. Vingt-six Haïtiens ont été renvoyés mercredi 12 juin dans leur pays après s’être échoués lundi sur les côtes de la Guadeloupe, a-t-on appris de source policière.

Les Haïtiens et leur passeur, un Dominiquais, ont prétendu avoir été en route pour Saint-Thomas (îles Vierges des États-Unis) dans la mer des Caraïbes, selon la source policière. Leur bateau s’est échoué lundi sur un rocher émergé au Nord de la Guadeloupe, dans l’une des zones connue pour être les plus ardues du parcours de la Route du Rhum.

Récupérés par les effectifs des douanes, des sapeurs-pompiers et de la SNSM, les passagers du bateau, dont la santé n’était pas en danger, ont été placés directement dans une “zone d’attente temporaire”, proche de l’aéroport, avant d’être renvoyés en Haïti, a indiqué à l’AFP la police aux frontières. 

Cette migration est loin d’être nouvelle, et se fait principalement en direction de l’Amérique du Sud et de la République Dominicaine voisine. Mais selon l’antenne guadeloupéenne de la Cimade, le nombre de Haïtiens qui fuient vers les îles françaises a augmenté ces dernières semaines avec la crise politique et sociale qui paralyse de nouveau  l’île depuis plusieurs mois.

Le scandale “PetroCaribe” en toile de fond

Depuis le mois de février, Haïti est confronté à de violentes manifestations contre le pouvoir au cours desquelles au moins sept personnes ont été tuées. Ces émeutes ont entraîné mi-mars la chute du gouvernement, mais depuis le processus politique pour installer un nouveau cabinet est bloqué par le Parlement. Sans ministres en fonction, sans encore de budget voté pour l’année fiscale qui a débuté en octobre 2018, Haïti est également menacée par une crise constitutionnelle car la tenue d’élections législatives à l’automne est incertaine.

À ce climat déjà tendu est venu s’ajouter début juin un rapport de la Cour supérieure des comptes: ce document de plus de 600 pages s’intéressait notamment au programme “Petrocaribe”, mis en place entre 2008 et 2018 par l’ancien président vénézuélien Hugo Chavez, et qui a permis à plusieurs pays d’Amérique latine et des Caraïbes -dont Haïti- d’acquérir des produits pétroliers à un prix avantageux.

Ce programme d’aide, toujours perçu comme source de gaspillage et de corruption, a déjà donné lieu, en 2016 et 2017, à deux enquêtes sénatoriales. Mais le dernier rapport de la Cour supérieure des comptes pointe directement du doigt l’actuel président de l’île, Jovenel Moïse, accusé d’être au cœur d’un “stratagème de détournement de fonds”.

Il est accusé d’avoir abusé des fonds alloués à son ancienne entreprise “Agritrans”, qui a reçu l’équivalent d’environ 700.000 dollars américains pour un projet de réhabilitation de routes en 2014. Problème: une deuxième entreprise avait aussi été mandatée par l’État pour ce même projet. Et les deux sociétés partagent  le même matricule fiscal et le même personnel technique.

“Les deux entreprises ont réalisé distinctement les mêmes ouvrages aux mêmes dates” révèle le rapport de la Cour qui conclut qu’il s’agit “ni plus ni moins qu’un stratagème de détournement de fonds”. “L’état de ce tronçon de route suscite des questionnements et démontre qu’il y a un décalage énorme entre les sommes dépensées et la réalité des travaux qui auraient été effectués” relate également le rapport des juges après leur visite de terrain. 

Les fonds de Petrocaribe devaient également servir à la reconstruction des zones sinistrées de l’île après le séisme dévastateur de 2010. Mais selon la Cour des comptes, au moins 314 millions de dollars se sont évaporés de façon douteuse dans la nature, sans que les chantiers entamés ne soient achevés. 

Le président Jovenel Moïse menacé

Ces rapports critiques - et notamment le dernier qui vise directement l’actuel chef de l’État- ont provoqué d’importantes manifestations. Dimanche 9 juin, des milliers de Haïtiens sont descendus dans les rues de Port-au-Prince pour réclamer la démission de Jovenel Moïse.

 

Haïti: des milliers de manifestants exigent la démission du président | AFP News

“Ces gens-là n’ont pas fait beaucoup d’effort pour dissimuler quand ils détournaient l’argent. C’est pour ça que le président doit démissionner : pour qu’on puisse finalement couper toute la tête de ce système de mafia qui se protège pour ne pas aller en prison et aller vers le procès Petrocaribe”, a affirmé dimanche avec espoir Velina Charlier, membre du mouvement citoyen “Petrocaribe Challenge” qui réclame la tenue d’un procès sur l’utilisation des fonds d’aide versés à Haïti.

Après un début de manifestation dans le calme, de violentes échauffourées en fin de parcours ont opposé des groupes de jeunes hommes aux forces de l’ordre à proximité du palais présidentiel et du siège départemental de la police. Le corps d’un homme, marqué d’une blessure par balle au thorax, a été retrouvé.

Après cette mobilisation, Jovenel Moïse est sorti de son silence le 12 juin, démentant toutes les accusations de corruption. 

 

 


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