Distinction – Le Choix Goncourt de l’Orient 2019 : Nathacha Appanah récompensée par 11 pays du Moyen-Orient
Parfois, un rayon de soleil luit au milieu des nuages. Ainsi en est-il du prix littéraire qui a été décerné à Nathacha Appanah mi-décembre au Liban, qui traverse une crise sans précédent depuis plusieurs mois. « Suite à la délibération à huis clos du grand jury étudiant du Prix littéraire francophone régional Le Choix Goncourt de l’Orient 2019 (…), le Prix a été décerné aujourd’hui à Le ciel par-dessus le toit, de Nathacha Appanah, publié chez Gallimard. »
Le Choix Goncourt de l’Orient est organisé par l’Agence universitaire de la francophonie au Moyen-Orient et l’Institut français du Liban. Le fruit des délibérations de son édition 2019 a été annoncé le 17 décembre dernier, à Beyrouth. « Enfin ! » est-on tenté de clamer car le niveau d’impatience et d’espoir avait grimpé en flèche peu après la rentrée littéraire française de septembre, lorsque l’on a appris que Le ciel par-dessus le toitétait nominé pour les prestigieux prix Goncourt et Renaudot, espoirs malheureusement déçus quelques semaines plus tard, dès l’annonce les lauréats…
Il faut rappeler aussi que ce roman, dont le titre reprend un vers d’Apollinaire sur l’enfermement, n’a cessé de susciter d’élogieuses critiques en France et dans le monde francophone dans la presse généraliste et spécialisée depuis le mois d’août. Ayant déjà vécu ce genre d’expérience après à la sortie de Tropique de la violence, la romancière elle-même disait garder la tête froide dès l’annonce des sélections finales des auteurs en lice, ne souhaitant pas trop s’enthousiasmer sur une probabilité pour laquelle elle n’avait en fait qu’une chance sur quinze, et se réjouissant déjà du rayonnement que l’annonce de ces nominations pouvait apporter à son roman.
Les nominés au Goncourt sont, par exemple, automatiquement nominés au Goncourt des lycéens, ce qui amène les quinze auteurs à intervenir dans de nombreux lycées à travers la France, pour présenter leur roman aux jeunes lecteurs, dont les membres du jury. Ces rencontres ont encore plus de sens pour notre compatriote, dont les personnages principaux sont le plus souvent des adolescents ou des jeunes hommes… Nathacha Appanah est une observatrice pointilleuse et attentive de la jeunesse, même lorsqu’elle nous fait remonter le temps, comme dans Le dernier frère.
Dix pays du Moyen-Orient
Le jury libanais a scellé son choix au deuxième tour du scrutin avec 26 voix sur 36. Le Choix Goncourt de l’Orient 2019 a une vocation internationale, puisque son jury de quelque 36 membres représente 32 universités de dix pays du Moyen-Orient, à savoir : Djibouti, Égypte, Émirats arabes unis, Irak, Iran, Jordanie, Liban, Palestine, Soudan et Syrie. Au-delà de l’effet promotionnel qu’apporte obligatoirement l’attribution de ce prix et de nombreux rendez-vous qu’aura Nathacha Appanah tout au long de cette nouvelle année avec les lecteurs de cette région du monde, ce prix présente l’avantage d’enclencher la traduction du livre primé en arabe. Cela multiplie considérablement les chances d’être lu dans cette région et ailleurs, partout où les lecteurs ont besoin d’échapper par la pensée à une réalité quotidienne souvent violente.
Le Salon du livre au cours duquel ce prix est traditionnellement annoncé a dû être annulé, mais le prix n’en a pas moins été proclamé dans un autre contexte, à l’Institut français du Liban. L’annonce en a été faite en français et en arabe par les deux plus jeunes membres du jury. Il faut savoir aussi qu’un des membres de l’académie Goncourt, Pierre Assouline, a participé à distance à cette édition. Enfin, un débat public entre les étudiants, modéré par la présidente du grand jury, la romancière Salma Kojok, a suivi la proclamation. Enfin, Nathacha Appanah sera invitée au prochain Salon du livre de Beyrouth. Elle nous en dit plus sur l’appréciation du jury : « J’ai été contente et honorée par le Choix Goncourt de L’Orient. Malgré l’annulation du Salon du livre de Beyrouth, le prix et les délibérations ont été maintenus et c’est formidable. J’ai appris que ce roman a particulièrement touché les lecteurs des onze pays par sa manière pudique de parler des liens familiaux, de la transmission et de l’empêchement. J’espère que le Salon de Beyrouth aura lieu l’année prochaine et que j’aurais le bonheur de rencontrer mes lecteurs à ce moment-là. »