Parité et intercommunalité : Lettre ouverte aux parlementaires de Martinique
Louis BOUTRIN
Mesdames et Messieurs les Députés(es)
Madame et Monsieur la(e) Sénatrice(teur)
L’actualité politique récente a été marquée par l’élection de trois nouveaux présidents à la tête des Communautés d’agglomération de Martinique. Ce changement est salutaire pour la vitalité démocratique du pays. On ne peut donc que féliciter tous ces élus qui acceptent la lourde charge d’assurer la gestion de nos affaires à l’échelle des trois territoires géographiques.
Cependant, l’autre fait marquant de ces élections intercommunales est la marginalisation des femmes qui, à l’issue de ces scrutins de juillet 2020, demeurent reléguées à la porte de ces instances de décision et de pouvoir que sont les établissements publics à caractère intercommunal (EPCI) :
- CACEM : 3 femmes (6ème, 8° ; 10°) sur 15 vice-présidents soit 20 %
- CAPNORD : 3 femmes (1ère, 12°, 14°) sur 15 vice-présidents soit 20 %
- C.A. ESPACE SUD : 3 femmes (7°, 13 ; 14°) sur 14 vice-présidents soit 21,42 %.
Ces chiffres sont en évolution mais ils témoignent toujours d’une situation inégalitaire qui ne saurait perdurer dans une société post-coloniale où les femmes ont joué un rôle essentiel dans l’édification et la structuration du pays Martinique.
Considérant que l’exigence de justice et de démocratie exprimée à travers les récentes lois en faveur de la parité ne peut être garantie par l’exclusion de femmes des centres décisionnels.
Considérant que la persistance de stéréotypes sexistes constitue un sérieux obstacle à l’accès des femmes martiniquaises aux responsabilités du pays-nôtre,
Considérant que la montée en puissance des EPCI dans le champ politique avec accroissement des compétences et implication directe dans la vie des martiniquais (es) (développement économique, eau & assainissement, gestion des déchets, politique de la ville, tourisme) ne peut se concevoir sans une participation effective des femmes aux fonctions électives à tous les niveaux.
Considérant que le partage des taches au quotidien nous impose aussi un partage du pouvoir politique,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires, le moment est venu de faire rentrer l’autre moitié de la société martiniquaise dans l’égalité.
Aussi, à l’instar des avancées indéniables introduites par la loi du 17 mai 2013 qui impose la parité sur les listes de candidats (es) aux élections municipales, vous avez la possibilité d’œuvrer en ce sens en proposant au Parlement l’extension des règles paritaires dans les modes d’élections des conseils et exécutifs des EPCI.
Vous en conviendrez qu’une telle évolution est attendue par plus de la moitié du corps électoral de la Martinique. Dès lors, votre réponse et vos initiatives en faveur de cette cause mériteront d’être rendues publiques.
Car, au-delà de la défense du principe de parité, c’est bien la question du développement de la société martiniquaise qui est aussi posée.
A cet effet, Kofi Annan a déclaré que : « L’égalité des sexes est plus qu’un objectif en soi. C’est une condition préalable pour relever le défi de la réduction de la pauvreté, de la promotion du développement durable et de la bonne gouvernance » ?
Autant de défis qu’il nous appartient de relever collectivement et solidairement.
Martinique, le 19 juillet 2020
Louis BOUTRIN