Bilan du "Festival Entènasyonal Litérati Kréyol" (02-06 décembre) en Haïti
Yves-Marie Séraline
En tant que responsable de l’OMDAC, j’ai eu l’opportunité de participer du 2 au 6 décembre dernhier à la réalisation du Festival Enténasyonal Litérati Kreyol en Haiti, comme partenaire de l’évènement, mais surtout comme chargé par des auteurs et éditeurs de valoriser la production littéraire créolophone de nos territoires : Guyane, Sainte Lucie, Martinique, Dompnique, Gualdeloupe. J’ai eu le plaisir de représenter Raphael Confiant, figurant parmi les auteurs à l’honneur cette année.
Dès la première édition en 2019 , nous avions eu l’occasion de montrer des ouvrages de Martinique, mais pour le FEL K 2020, la dimension internationale a pris véritablement son sens grâce à l’éventail des auteurs présentés. Malheureusement nous savons bien que de nombreuses raisons n’ont pas permis la présence d’autres intervenants pour cette année. Néanmoins le public a pu apprécier les publications et catalogues des éditeurs Orphie, Neg Mawon, Ed. Bitako, Editions du Sucrier, et les ouvrages remis par les auteurs R. Confiant, G.H. Léotin et l’association des auteurs, Jude Duranty, Terez Léotin (Martinique) Ela Eluther, Didier Mannette, (Guadeloupe,) J.A. Stephenson (Guyane). Raphaël Confiant a mis à disposition des ouvrages issus notamment des recherches universitaires (Gerec-F, Crillash).
Néanmoins, j’ai pris la responsabilité d’honorer mes engagements et ceux de l’association dont cette action de coopération culturelle est inscrite dans son programme annuel, estimant que la qualité du projet et les perspectives qui en découlent justifiait des efforts particuliers et même certains sacrifices. L’itinéraire pour parvenir à Port-au-Prince a été long et compliqué en passant par Paris et République Dominicaine, puisqu’il n’y a toujours pas de liaison aérienne régulière au départ de Fort-sde-France ou Pointe-é-Pitre, depuis mars pour cause de crise sanitaire, sauf des charters pour expulsés haïtiens.
Les résultats nous ont donné raison de faire ces efforts. Cet évènement culturel s’est globalement déroulée comme annoncé sous la houlette de Anivince Jean Baptiste soutenu par sa formidable équipe de militants, avec des rencontres, expositions, interventions en milieu scolaire, et en clôture l’animation conçue par nous « Kreyolfiesta », permettant à des artistes de scène dont les membres haïtiens de l’OMDAC, d’intervenir en support des textes déclamés par des auteurs. Nous avons pu montrer aux visiteurs les livres fournis par la participation volontariste de nos auteurs et éditeurs, complétés par la reproductions de documents fournis numériquement par nos amis de Sainte Lucie et Dominique, avec Gregory Rabess et Ras mo en première ligne, dans les lieux suivants :
-Jardins du Musée national d’Ethnologie -BNE
-Espace culturel Ti Sonson
-Yanvalou, un des lieux culturels les plus connus d’Haïti
- une équipe s’étant rendue pendant une journée dans les villes de saint Marc et Gonaives. Tous les éditeurs haitiens qui font la promotion de la langue créole étaient présent, comme C3 éditions ou Kopivit.
Le stand collectif animé par l’OMDAC a été très fréquenté, avec une présence importante de lycéens et d’étudiants dans le public, grâce à cet apport déterminant de nos auteurs et éditeurs de la zone.
Pour ma part, j’ai assuré au quotidien une présence à l’occasion des tables ronde quotidiennes aux côtés des auteurs Lyonel Trouillot ,Pierre Michel CHéry (Membre de l’Académie Créole Haïtienne) Rodolphe « Sonson » Mathurin( animateur d’u espace culturel) , Emmanuel Jacqhuet (Directeur de la Direction Nationale du Livre), ainsi que de jeunes auteurs du pays . Nous y avons évoqué devant des publics divers et des scolaires la production littéraire et les problématiques liées à l’édition d’ouvrages en créole, ou encore partagé la réflexion sur l’importance des pratiques de la langue dans nos régions en particulier de le système scolaire. Les questions scientifiques ont particulièrement motivé les participants conscients des variations linguistiques et de la nécessité de continuer à travailler sur des positions communes à ce sujet.
Il est important de souligner que malgré la situation générale du pays, qui montre une insécurité impactant fortement le fonctionnement de la population, ainsi que son mental, s’ajoutant à cela les restrictions dues à la crise sanitaire, et cette gouvernance improbable du pouvoir, les acteurs culturels haïtiens ne se laissent pas abattre. Une forte résilience culturelle en est la preuve depuis plusieurs mois, se traduisant par des actions de qualité attirant le public, dans une logique d’hybridation entre interventions dans des lieux et l’utilisation massive des outils numériques pour la diffusion. Le FEL Kreyol en est un exemple.
Des perspectives sont tracées. En premier lieu la préparation de la prochaine édition qui devrait être supportée par la Fondation Maurice Sixto, la DNL de Haïti, l’Acamédie créole et des entreprises, toujours avec le partenariat avec l’OMDAC. Pour Anivince Jean Baptiste, chargé de faire la synthèse des propositions, Il n’est pas impossible d’imaginer un cahier de recommandations et de motions s’adressant à toute institutions ou autorité concernée, et de mettre en place une alternance de territoire pour la réalisation de l’action.
Les participants ont ainsi convenu qu’il est nécessaire de réfléchir à des espaces communs comme une bibliothèque numérique créole ou un site web spécialisé pour les textes, et surtout à un rapprochement des chercheurs pour continuer les explorations effectuées depuis les années 80. Naturellement le regard sera porté aussi vers l’océan indien. Il ne reste plus qu’à espérer que les déplacements seront permis et que la psychose de l’insécurité pèsera moins sur les décisions des participants potentiels à être présent sur le terrain.