FRANKETIENNE POUR CELEBRER MARIE ALICE THEARD
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Venue d’ailleurs et de loin, tu vis pourtant dans la proximité des clartés d’ici et le jaillissement des énigmatiques splendeurs du présent perpétuel. Tu as souvent confié que tu as traversé de nombreuses saisons pour transcender l’éphémère et flairer la divine incandescence de l’espace-temps. Certains sceptiques ont, peut-être, banalisé tes paroles. Moi, ton vieil ami, j’ai, patiemment, appris à décrypter les battements inaudibles de ta mystérieuse réincarnation interminablement neuve.
Rien n’a été facile tout le long de ton voyage. Marcher. Trébucher. Éviter les chutes catastrophiques et les viscosités de la peur. Reprendre la route périlleuse aux spasmes de tes rêves inextinguibles. Tu as toujours réussi à mettre en déroute les monstrueuses milices des orages agressifs et des tempêtes cacophoniques.
À partir de l’emprisonnement de ton père sous le régime despotique de Duvalier, tu cessas du coup d’être une adolescente ingénue pour assurer, à l’âge de 13 ans, ta propre vie autant que la gestion du quotidien dans le champ des responsabilités familiales. Tu appréhendais déjà, par l’expérience et la pratique, les rigueurs et les incertitudes de l’existence.
Aventure exaltante et douloureuse à la fois dans le chavirement des vagues du hasard des récifs et des vents souvent nocifs jusqu’aux rugissements des malheurs qui ont frappé sans répit ton corps et ton âme.
Pendant plus d’une semaine torturée par les griffes des ténèbres, tu as été aveugle. Totalement aveugle. Peut-être pour mieux découvrir les glorieuses splendeurs de la lumière intangible. Et pendant huit années, une fortuite clarté, comme issue d’un songe, t’envoya une douce musique presque irréelle pour réveiller un seul de tes yeux. Et tu obtins la chance de devenir borgne durant ces huit années de grâce, au cours desquelles tu créas « L’ile mystérieuse et magique » en animant à la télévision une émission culturelle, artistique, littéraire et sociale d’une haute facture.
Je ne vais pas évoquer les horreurs et tribulations qui auraient provoqué l’effondrement de ton être, si tu n’avais pas en toi, au fond de toi et tout autour de toi la protection du bouclier divin. Tes nombreuses Vierges, tes saintes gardiennes t’ont rendue indestructible.
Poursuis ton chemin !
Continue ton voyage !
Un immense merci pour ton travail
comme historienne de l’art !
Un musical merci pour ta présence utile, pour tes paroles de sève qui ont guidé tant d’artistes dans le champ de la créativité picturale !
Quant à ton oeuvre littéraire et surtout poétique, elle demeure une référence esthétique par son intensité, sa densité et sa pluridimensionnalité. Elle nous incite à prendre conscience de l’essence fondamentale de la vie : un étrange mélange de joies et de douleurs. Un étonnant métissage d’ombres et de clartés. Un enchainement de mythes explosifs à travers le feu des énigmes, des symboles et des signes où l’on perçoit l’inextinguible souffle de Dieu !
Marie Alice Théard, je n’ai pas voulu te présenter. J’espère t’avoir célébrée comme tu le mérites. Tu demeures la femme totale-capitale !.
Frankétienne
3 août 2016