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L’île Maurice accueille le centenaire de l’abolition de l’engagisme

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L’île Maurice accueille le centenaire de l’abolition de l’engagisme

L’île Maurice accueille le centenaire de l’abolition de l’engagisme

La semaine prochaine, le 17 au 20 août, notre île sera la capitale mondiale des commémorations marquant le centenaire de l’abolition de l’engagisme et les soixante-dix ans de l’indépendance de l’Inde. Etalés sur trois jours, les événements patronnés par le Conseil Indien de Coopération Internationale et organisés par le GOPIO International et la Fondation Girmitya (ou engagés) honoreront la mémoire des travailleurs indiens et s’ouvriront sur la portée symbolique, anthropologique, culturelle et les visions créatives nées de cette page de l’Histoire contemporaine.

RAPPEL HISTORIQUE : Abolition officielle de l’engagisme en 1917

 

Il est important de bien situer ce centenaire. Pour le sémiologue Khal Torabully, cette commémoration du  centenaire puise ses racines dans l’imbrication entre l’histoire de l’engagisme et l’indépendance de l’Inde. C’est l’explication de la célébration conjointe de ces deux événements qui aura lieu à Maurice la semaine prochaine. Un retour s’impose donc pour bien saisir ce que l’engagisme a pu avoir comme importance dans le combat des Indiens pour leur indépendance.

 

L’engagisme fut officiellement aboli par la Grande Bretagne en 1917. Après une période de coolie trade initiée globalement en 1834, à l’abolition de l’esclavage,  les ligues abolitionnistes dénoncèrent le travail des travailleurs indiens, qu’ils rapprochèrent du travail servile. et aboutit à la fin officielle du recrutement des engagés en 1917. La même année, les Etats-Unis mirent fin à l’engagisme des asiatiques, quand ils annexèrent Hawaï, où des engagés étaient à l’œuvre dans les cannaies. La Californie mit fin au coolie trade la même année. Notons aussi que c’est en 1920 que l’engagisme s’arrêta dans les faits, voire bien après, dans certains pays.

 

  1. C’est cette date officielle, peu connue au moment même de sa commémoration, qui mérite toute notre attention car elle constitue un moment d’importance dans l’histoire de l’humanité. En effet, en 1917, il fut interdit de déporter des indiens endettés pour être engagés hors de l’Inde. C’est aussi en 1917 que l’empire Britannique capitula devant les revendications des nationalistes indiens. Des manifestations eurent lieu en Inde dès 1916, de même que des négociations pour mettre fin à l’engagisme.

L’Inde se mobilise contre le coolie trade

 

En 1915, mourut le leader Gokhale, chantre du combat pour une Inde digne et libre, laissant un vide au niveau du leadership des nationalistes. A cette époque, Gandhi, déjà aguerri contre les autorités coloniales lors de ses actions sud-africaines, notamment dans sa défense des engagés au Natal, était revenu au pays. Les maltraitances envers les engagés, notamment au Fiji, étaient sans cesse signalées aux Indiens. L’engagé symbolisait de plus en plus la figure de l’Indien maltraité par le maître des Indes.

Devant le refus d’un engagement clair des autorités coloniales à mettre fin à l’engagisme, Gandhi débuta ses campagnes de mobilisation à travers l’Inde.

Une rapide genèse de ce mouvement d’importance est nécessaire, tant en Inde qu’au-delà.

 

Gandhi et la défense des engagés

 

Dès 1894, en Afrique du Sud, Gandhi énonçait clairement une articulation, une transition d’échelle dans sa lutte à Natal contre la taxe de 25 livres pesant sur l’engagé indien.

Il écrivit que les autorités sud-africaines avaient été contactées par les blancs pour réduire l’arrivée des coolies. Ainsi, les blancs avaient proposé que les engagés fussent rapatriés en Inde, ce que le gouvernement indien refusa. Alors, on suggéra la levée d’une taxe de 25 livres annuelle pour tout engagé préférant demeurer en Afrique du Sud. Une délégation sud-africaine fut envoyée aux Indes pour entériner cette taxe. Le vice-roi Elgin réduisit le montant de la taxe à 3 livres. Cela signifiait en clair qu’une famille de 4 personnes devait s’acquitter d’une taxe de 12 livres, une somme conséquente à l’époque. Gandhi condamna fermement cette décision.

Gandhi fit ensuite remarquer que la justesse de cette lutte ne concernait pas que les engagés de Natal, mais de toute l’Afrique du Sud. La cause coolie cessa dès lors d’être une affaire locale ou régionale.

 

Un autre glissement d’échelle s’opéra quand Gokhale, le leader des nationalistes, militant pour la cause coolie, passa la main à Gandhi, dont l’autorité en matière de lutte pour la dignité des Indiens était sans conteste : « Les souffrances des Indiens étaient l’expression de cette vérité. Pourtant, elle n’aurait pas triomphé si une foi inébranlable, beaucoup de patience et des efforts incessants ne l’avaient fait éclore. Si la communauté n’avait pas lutté, si le Congrès avait abandonné la campagne et s’était soumis à l’impôt jugé inévitable, la taxe haïe aurait continué à gangréner les Indiens engagés jusqu’à ce jour, contribuant à la honte éternelle des Indiens d’Afrique et du Sud de l’ensemble de l’Inde (mes italiques)». Gandhi ne pouvait être plus clair: la perception de la taxe des coolies quittait dès lors la seule population indienne de l’Afrique du Sud pour s’imposer à la conscience et la dignité de TOUTE l’Inde.

 

Khal Torabully donnant le coup d’envoi au centenaire de l’abolition au Monument des Engagés à Capesterre, en Guadeloupe, en janvier 2017, en compagnie de Michel NarayaninssamyKhal Torabully donnant le coup d’envoi au centenaire de l’abolition au Monument des Engagés à Capesterre, en Guadeloupe, en janvier 2017, en compagnie de Michel Narayaninssamy

La double commémoration de Maurice, un programme de haute facture

 

La Guyane, Trinidad et d’autres pays ont déjà célébré l’abolition du centenaire de l’engagisme. Rappelons que Khal Torabully représenta l’UNESCO aux événements qui eurent lieu en Guadeloupe. La commémoration de Maurice sera un événement de portée internationale, réunissant des experts reconnus mondialement. Elle est la résultante d’une synergie internationale, ancrant Maurice au cœur de cet événement.

 

Le Dr Torabully présidera le première session des travaux due l’engagisme en Afrique du Sud et à Fiji, auquels particperont le Dr Brij Lall, le Dr K. Hirallal et le Dr Golam Vahed. En deuxième partie ; le Professeur Lall présidera une table-ronde sur l’enggisme et les perspectives mondiales, auxquels participeront le Dr Ajay Dubey, Armoogum Parsuraman qui parlera de la route internationale des engagés et la diaspora issue du coolie trade. Khal Torabully, lui, s’exprimera sur les visions culturelles innovantes de la Grande expérience.

 

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Le soir, plusieurs personnalités prendront la parole, dont Mookhesswur Choonee, Madame Baswati Mukherjee, ex-ambassadeur de l’Inde à l’UNESCO, Mahen Utchanah, Président du GOPIO International, M. Roopun, Ministre de la Culture de Maurice, SE Abhay Thakur, ambassadeur de l’Inde à Maurice et M. P. Pillay Vyapoory, vice-Président de Maurice. Le GOPIO récompensera dix personnalités issues de l’immigration indienne. Le Group Tambours Sacrés de la Réunion et un Geet Gawai ponctueront la soirée de  notes musicales festives. Une lecture de poèmes relatifs à l’engagisme sera aussi au menu de cette soirée, de même qu’une exposition sur l’engagisme venue de la Guadeloupe, présentée par Michel Narayaninssami, président du GOPIO Guadeloupe. Un hommage sera rendu aux anciens ministres de la culture de Maurice.

 

Le samedi 19 août, la Réunion fera entendre sa voix grâce aux travaux de Michèle Marimoutou et Céline Ramsamy. Raju Mohit développera l’aspect des langues hindi et bhojpuri dans l’esprit des immigrés. Le Dr Satyendra Peerthum, une des chevilles  ouvrières de cette commémoration, exposera sa vision de l’héritage intangible des engagés à travers le Ramayana et Ram Leela. Sarita Boodhoo, Devi Dayal Gautam, le Dr Jimmy Harmon et le Dr C. Bhat exploreront l’héritage et la dynamique de l’engagisme dans l’après-midi.

 

Ce programme de très haut niveau se poursuivra le dimanche 20 août au Taher Bagh, lieu qui accueillit Gandhi lors de sa visite à Maurice. Le Dr Golam Vayed y présidera la table-ronde axée sur l’engagisme en Guyane, au Trinidad, en Guadeloupe et à La Réunion. Y participeront : le Dr Vishnu Bisram, Govindama Yolande et Michel Narayaninssami. L’après-midi verra une dernière session académique débattant de l’engagisme à Maurice et au Surinam. Le Dr Peerthum présentera la communication du Dr Maurits Hassankhan et M. Sooriamoorthy réfléchira sur divers aspects de l’engagisme. La commémoration se terminera sur une lecture de textes poétiques de Khal Torabully.

 

Notons que les musulmans de Maurice s’associent à cette célébration en organisant des activités et une réception. Le jeudi, cette communauté qui avait accueilli Gandhi en 1920 à Maurice, accueillera une table-ronde sur « Visions et Perspectives de l’engagisme » et le dimanche soir, elle invitera les délégués à un grand dîner fraternel.

 

Par S.C


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