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MARTINIQUE : 4 TENTATIVES DE SUICIDE PAR JOUR

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MARTINIQUE : 4 TENTATIVES DE SUICIDE PAR JOUR

MARTINIQUE : 4 TENTATIVES DE SUICIDE PAR JOUR

   Le chiffre peut ne pas impressionner de prime abord, mais il doit être mis en rapport avec la modestie de la population martiniquaise soit 380.000 habitants et là, on se rend compte qu'il est tout simplement énorme, voire même effarant. Car 4 tentatives de suicide par jour, cela fait 28 par semaines et...122 par mois. Du coup, le chiffre se fait beaucoup plus parlant.

Ce problème n'est évidemment pas nouveau dans notre pays et dans les îles qui ont subi l'esclavage puisque l'on sait (et Aimé CESAIRE l'a rappelé dans un vers devenu célèbre) comment maints Africains déportés préférait se donner la mort en avalant leur langue, "avec la complicité de son hypoglosse" dit le poète, plutôt que de travailler dans les plantations de canne à sucre des Békés. Sans même parler de ces mères esclaves qui préféraient étrangler leur bébé à l'aide du cordon ombilical au moment de leur naissance et proclamant "Man pa ka fè yich ba lestravay" (Je refuse de faire des enfants pour l'esclavage). Si on fait un bond dans le temps jusqu'aux années 60 du XXe siècle, on tombe sur une véritable épidémie de suicides ou de tentatives de suicide au "Rubigine", produit permettant d'enlever les taches rétives sur les vêtements et extrêmement toxique, épidémie qu'a étudiée un grand médecin martiniquais, le Dr SOBESKY. Puis, dans les décennies suivantes, un autre grand médecin martiniquais, le Pr Aimé CHARLES-NICOLAS a étudié les formes que prend cette pathologie dans notre île et donc en contexte colonial ou quasi-colonial, mettant en place des thérapies très efficaces et publiant nombre d'articles scientifiques sur le sujet. Sinon, un psychologue québécois, Raymond MASSE, au terme de quinze années d'enquête de terrain à la Martinique, publiera, en 2008, un ouvrage marquant intitulé "DETRESSE CREOLE. ETHNOEPIDEMIOLOGIE DE LA DETRESSE PSYCHIQUE A LA MARTINIQUE". D'autres thérapeutes tant locaux qu'étrangers ont depuis abondamment travaillé sur le sujet.

   Or, aujourd'hui, certains cherchent à faire table rase de tout ce précieux acquis, clinique et scientifique, en considérant la question comme si l'on se trouvait en Basse-Normandie ou en Lozère, occultant ou minimisant les aspects historiques, sociologiques et politiques de celle-ci. Assiste-t-on alors au grand retour de cette psychiatrie coloniale qu'avait dénoncée le psychiatre martiniquais Frantz FANON lorsqu'il exerçait, au début des années 50, à l'hôpital de Blida, en Algérie ? On a tout lieu de le craindre au vu des pratiques désormais en vigueur et des déclarations à la presse de certains qui débarquent en Martinique comme Tintin au Congo. Nos politiques laisseront-ils faire ? Demeureront-ils les bras croisés comme trop souvent ? Accepteront-ils d'être les complices objectifs d'une psychiatrie néocoloniale ?

   La balle est dans leur camp en tout cas...


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