La Cour de Londres dit NON aux Chagossiens
Alain Dreneau, Georges Gauvin
Un bref retour en arrière n’est pas inutile pour comprendre l’origine de ce procès. En juin 2016, la Cour Suprême britannique a reconnu le droit des Chagossiens de faire appel si la Grande-Bretagne ne menait pas à bien les négociations promises par Theresa May à l’ONU.
Or quelques mois plus tard, le 16 novembre 2016, la même Theresa May a radicalement fermé la porte des Chagos aux Chagossiens. Elle a renouvelé pour 20 ans le bail consenti aux USA sans y inclure la moindre clause de droit au retour des Chagossiens.
A partir de cette trahison, Olivier Bancoult et les Chagossiens étaient en droit de repartir à l’assaut de la Justice britannique, et c’est ce qu’ils ont fait avec leur courage habituel, devant la Cour de Londres.
Cour de Londres. Photo : Wei-Te Wong.
Le cynisme dont se nourrit le jugement
Si le jugement de cette Cour ne constitue pas à vrai dire une grande surprise, connaissant la mauvaise foi régulièrement mise en œuvre par la partie britannique, le cynisme dont se nourrit le jugement de mercredi dernier atteint des sommets. Les magistrats soutiennent en effet dans leurs attendus [comme le rapporte "Le Quotidien de la Réunion" du 15 février 2019] que « la décision d’interdire aux membres de la communauté chagossienne de retourner dans l’archipel des Chagos pour des raisons de sécurité ne peut être jugée par une cour de justice » ! Autrement dit, la justice britannique n’a pas à intervenir dans une décision politique qui relève de la souveraineté britannique ! C’est donc exclusivement le gouvernement britannique qui peut intervenir ! Bel échantillon de démocratie dans un pays qui se targue d’en être un modèle.
L’argumentaire de la Cour de Londres est d’une pitoyable fragilité. Il suffit de remonter toute la saga des procès des années 2000 à 2008, où chaque séquence était ponctuée par un jugement d’une Cour de Justice. A commencer par le jugement historique du 3 novembre 2000, où c’était bien la Haute Cour de Londres qui avait solennellement reconnu que les Chagossiens étaient des autochtones des îles Chagos et qu’à ce titre ils pouvaient désormais retourner sur leurs terres.
Olivier Bancoult.
Déçu mais toujours prêt au combat
Donc, comme l’a dit Olivier Bancoult, « nos droits sont toujours bafoués ». Déçu mais pas découragé, il affirme ce qu’il a toujours dit : « Nous ne baisserons pas les bras ». Lui qui a vécu l’exil à l’âge de quatre ans, lui qui a mené une lutte très dure, semée d’embuches, lui qui a vu disparaître des êtres chers qui n’ont pas atteint la terre promise, il est certain qu’il ne baissera pas les bras !
La décision de faire appel est d’ores et déjà prise. L’heure n’est à coup sûr pas à l’abattement. La lutte continue… Qui peut dire par exemple, pour le procès en appel, si Theresa May sera toujours en place, solide à son poste ? Un autre élément important va intervenir très prochainement dans le puzzle chagossien. Il s’agit de la Cour internationale de Justice de La Haye, qui va livrer son avis très attendu avant la fin de ce mois. Même si cet avis n’a pas le statut de « jugement », même s’il n’est donc pas « contraignant », il est certain qu’il aura un impact sur le déroulé des faits et gestes à venir, de la part des différents acteurs de ce dossier appelé à avoir un grand retentissement international.
Georges Gauvin, président
Alain Dreneau, secrétaire
Comité Solidarité Chagos La Réunion